Le geste tragique de Marianne Bachmeier : une justice personnelle qui bouleverse encore l’Allemagne

  En 1981, cette mère allemande abat le meurtrier de sa fille en plein procès. Quarante ans plus tard, son acte continue de diviser entre compassion et condamnation.

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Le 6 mars 1981, l’Allemagne entière retient son souffle. Dans une salle d’audience de Lübeck, Marianne Bachmeier abat Klaus Grabowski, l’homme accusé d’avoir enlevé, torturé et tué sa fille Ana, âgée de 7 ans. Ce geste, commis sous les yeux du tribunal, restera gravé comme l’un des faits les plus marquants de la justice allemande du XXe siècle.

Une mère brisée face à l’horreur

Marianne Bachmeier arrive ce jour-là au tribunal avec un pistolet dissimulé dans son sac à main. Lorsque Grabowski prend la parole, elle sort l’arme et tire. Le meurtrier de sa fille meurt sur le coup. La salle plonge dans la stupeur. Cette mère anéantie n’exprime aucun remords. Arrêtée immédiatement, elle assume pleinement son acte, justifiant son geste par un chagrin impossible à contenir.

Les médias s’emparent de l’affaire. Très vite, elle devient la « maman vengeresse », figure controversée d’une justice rendue par la colère et la douleur. Condamnée à six ans de prison, elle n’en effectuera finalement que trois. Ce verdict, encore débattu plus de quarante ans plus tard, continue de diviser.


Un sondage de l’Allensbach Institute révèle d’ailleurs une opinion publique profondément partagée : 28 % des Allemands jugent la peine adaptée, 27 % la trouvent trop sévère, et 25 % trop clémente. Cette répartition quasi équilibrée traduit l’ambiguïté morale entourant le geste de Marianne Bachmeier.

Un passé marqué par la souffrance

La vie de cette femme ne commence pas sous de bons auspices. Son père, ancien membre de la Waffen-SS, laisse une empreinte douloureuse dans son enfance. Très jeune, elle subit plusieurs agressions sexuelles. À 16 ans, elle tombe enceinte et confie son bébé à l’adoption. Deux ans plus tard, elle vit une situation similaire et se résigne encore à abandonner son enfant.

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À 22 ans, elle met au monde Ana, sa troisième fille. Cette fois, elle décide de l’élever seule. Leur lien est fort, mais la précarité et les tensions du quotidien pèsent sur la jeune mère. En mai 1980, une dispute éclate. Ana quitte la maison et sèche l’école. Ce jour-là, elle croise le chemin de Klaus Grabowski, un homme de 35 ans au passé lourd, déjà condamné pour des crimes sur mineurs.

L’histoire bascule. L’enfant disparaît, et son corps est retrouvé peu après. Ce drame anéantit Marianne. Quelques mois plus tard, elle commet l’acte qui fera d’elle un symbole de la vengeance maternelle.

Un débat sans fin sur la justice et la douleur

L’affaire Bachmeier dépasse le simple cadre judiciaire. Elle interroge la frontière entre la justice et la vengeance, entre la loi et l’instinct. Beaucoup voient en elle une victime qui a simplement réagi à une douleur insupportable. D’autres rappellent que la violence ne peut jamais réparer une injustice, même la plus atroce.

Aujourd’hui encore, l’histoire de Marianne Bachmeier continue d’émouvoir et de diviser. Son geste, né du désespoir, soulève une question universelle : jusqu’où peut aller une mère pour défendre la mémoire de son enfant ?


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