L’ouragan Melissa laisse au moins 28 morts et un pays dévasté

  Avec des vents atteignant 300 km/h, le cyclone le plus puissant depuis 90 ans plonge l’île dans l’urgence humanitaire et relance l’appel à une mobilisation internationale face aux dérèglements climatiques.

Montrer le sommaire Cacher le sommaire

En Jamaïque, le choc et la stupeur dominent. L’île caribéenne tente encore de mesurer l’ampleur de la tragédie laissée par le passage de l’ouragan Melissa, qui a balayé le territoire avec des vents approchant les 300 km/h. Au moins 28 personnes ont perdu la vie, selon le dernier bilan communiqué par le Premier ministre Andrew Holness. Un chiffre provisoire, car les équipes de secours craignent de découvrir d’autres victimes dans les zones encore inaccessibles.

Au-delà des pertes humaines, cette tempête d’une violence exceptionnelle a dévasté des infrastructures essentielles, emporté des habitations et plongé des régions entières dans le silence, faute d’électricité et de communications. Pour ce pays déjà fragile économiquement, le désastre marque un coup d’arrêt brutal, ravivant les souvenirs des ouragans qui ont façonné son histoire récente — du tristement célèbre Gilbert en 1988 au plus récent Dean en 2007. Mais pour les autorités comme pour les Nations unies, une réalité s’impose déjà : Melissa représente un tournant.

Un ouragan historique et un bilan qui pourrait encore grimper

Mardi, lorsque Melissa touche terre sur la côte jamaïcaine, les services météorologiques la classent en catégorie 5, le niveau le plus élevé sur l’échelle de Saffir-Simpson. Avec des rafales flirtant avec les 300 km/h, il s’agit du cyclone le plus puissant à frapper l’île en près de 90 ans. Très vite, les images de toitures arrachées, de routes transformées en torrents et de quartiers entiers isolés font le tour du monde.


« Le gouvernement jamaïcain est profondément attristé de confirmer 28 décès liés à l’ouragan Melissa », annonce Andrew Holness sur les réseaux sociaux. Le dirigeant prévient toutefois que ce bilan pourrait s’alourdir : de nombreuses zones restent difficiles d’accès, et les autorités vérifient encore des signalements de disparitions. Les services d’urgence, mobilisés sans relâche, peinent à atteindre certaines communautés rurales encerclées par les inondations ou les glissements de terrain.

Une catastrophe régionale : Haïti, Cuba et les Caraïbes durement touchés

L’ouragan ne s’est pas contenté d’éprouver la Jamaïque. Avant et après son passage sur l’île, Melissa a ravagé plusieurs territoires des Caraïbes, causant près de 60 morts selon les estimations provisoires. Haïti, déjà en proie à une instabilité sociale et politique chronique, a vu des quartiers densément peuplés submergés et isolés. À Cuba, où le cyclone a frappé mercredi en catégorie 3, la situation demeure floue : les autorités n’ont pas encore communiqué de bilan humain, mais évoquent des millions de personnes affectées par les coupures d’électricité, les dégâts matériels et l’interruption des transports.

Dans ces territoires où les ressources publiques sont déjà limitées, la reconstruction s’annonce titanesque. Les systèmes de santé, fragilisés par les crises successives et le manque chronique d’investissements, peinent à absorber l’afflux de blessés. Pour éviter un effondrement sanitaire, l’Organisation mondiale de la Santé a déjà prévu, avec l’appui de pays partenaires comme l’Espagne, le Canada ou l’Inde, l’installation d’hôpitaux de campagne.

L’économie jamaïcaine sous le choc

Si l’urgence humanitaire est immédiate, les conséquences économiques de Melissa s’inscrivent dans le long terme. Pour un pays où le tourisme représente près d’un cinquième du PIB et des centaines de milliers d’emplois directs et indirects, la destruction d’infrastructures côtières et de réseaux électriques fait craindre une paralysie prolongée.

Selon l’expert Chuck Watson du centre de recherche Enki, cité par Bloomberg, les pertes pourraient atteindre 7,7 milliards de dollars, soit environ 35 % du produit intérieur brut jamaïcain. Une estimation vertigineuse qui dépasse largement les dégâts causés par l’ouragan Gilbert en 1988, longtemps considéré comme la catastrophe naturelle la plus coûteuse de l’histoire moderne du pays.

À lireAlerte Caraïbes ! La tempête Jerry pourrait se transformer en ouragan à tout moment. Prenez vos précautions

Les caractéristiques du cyclone expliquent en partie ce bilan : lent, saturé d’humidité, et doté d’une intensité rare, Melissa a martelé les mêmes zones pendant des heures. Ce type de phénomène, autrefois exceptionnel, tend désormais à se répéter plus fréquemment — un constat que les scientifiques associent directement au réchauffement climatique et à la hausse des températures océaniques.

Mobilisation internationale : solidarité et enjeux logistiques

La réponse s’organise à l’échelle mondiale. Antonio Guterres, secrétaire général des Nations unies, a appelé à une « mobilisation massive » de la communauté internationale. Le Fonds central d’urgence humanitaire de l’ONU a débloqué quatre millions de dollars pour accélérer les opérations sur le terrain. Des avions cargos transportant des équipements médicaux, des générateurs électriques et des vivres sont d’ores et déjà attendus à Kingston.

Le Royaume-Uni a envoyé un navire de la Royal Navy et des équipes d’intervention rapide, promettant un « soutien total » au gouvernement jamaïcain. Les États-Unis, eux, ont dépêché des équipes spécialisées dans la gestion de catastrophes naturelles en Jamaïque, à Haïti et aux Bahamas, avec pour mission de sécuriser la distribution de vivres, d’eau potable et de matériel d’urgence.

Certaines entreprises privées participent également à l’effort. Starlink, le réseau satellitaire privé d’Elon Musk, a fourni des terminaux permettant le rétablissement rapide des communications dans les zones isolées — un outil devenu crucial dans la gestion moderne des crises climatiques.

Un rappel brutal de la menace climatique

Melissa n’est pas un phénomène isolé. Il s’agit du treizième phénomène cyclonique de la saison atlantique 2025, marquée par une série d’orages tropicaux et d’ouragans d’intensité inhabituelle. Scientificement, le lien entre réchauffement climatique et intensification des ouragans est aujourd’hui largement documenté : des océans plus chauds alimentent des cyclones plus puissants, plus humides et plus destructeurs.

Pour les petites nations insulaires, souvent situées en première ligne des dérèglements climatiques, la menace n’est plus future — elle est présente. Chaque saison apporte son lot de destructions, de déplacements forcés et de pertes économiques colossales. La Jamaïque, comme de nombreux pays du Sud, plaide depuis des années pour un financement international renforcé dédié à l’adaptation climatique. Le drame de Melissa ravive cette demande, avec une urgence accrue.

À lireOuragan Melissa : la catégorie 5, symbole absolu de la puissance des tempêtes tropicales

Alors que les Jamaïcains comptent leurs morts et tentent d’aider les survivants, une certitude s’impose : Melissa restera dans l’histoire comme l’un des cyclones les plus dévastateurs à avoir frappé la région. Le pays affronte désormais un double défi secourir et reconstruire avec des ressources limitées et la perspective de nouvelles tempêtes à venir.

Face à cet avenir incertain, la solidarité internationale et la préparation aux catastrophes climatiques apparaissent plus cruciales que jamais. La crise actuelle souligne également un enjeu mondial : les pays les moins responsables du réchauffement climatique en subissent souvent les conséquences les plus lourdes.

Le passage de Melissa laisse une leçon claire : dans un climat en mutation rapide, l’adaptation n’est plus une option mais une nécessité vitale. Pour la Jamaïque, comme pour l’ensemble des Caraïbes, la résilience sera désormais au cœur de toute stratégie de survie.


Vous êtes ici : Accueil - L’ouragan Melissa laisse au moins 28 morts et un pays dévasté